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OU RECUEIL D’ÉTUDES

jamais.[1] Règle générale, la vérité et l’erreur sont aux extrêmes. C’est le libéralisme, qui cherche à concilier la vérité avec l’erreur qu’on trouve au milieu. Dans le cas qui nous occupe, la vérité se trouve soit du côté des uns qui admirent, sans réserve, les livres de M. Parkman, soit du côté des autres qui les blâment sévèrement.

Gardons-nous des sophismes. Un livre, mauvais dans son ensemble, peut renfermer certaines vérités, mais il est impossible qu’un ouvrage où se rencontre une seule erreur grave puisse être autre chose qu’une œuvre mauvaise et partant condamnable. On peut quelquefois louer le bien qu’on trouve dans un mauvais livre, jamais le livre même.

Il est inutile de dire que M. Parkman est protestant. Pour le critique catholique, il n’y a pas d’autre point de vue possible que celui où se place l’Église. Le protestantisme de M. Parkman peut expliquer ses écrits ; il ne saurait les excuser.

M. Casgrain se flatte d’avoir jugé les ouvrages de M. Parkman d’une manière impartiale, de les avoir considérés dans leur ensemble. J’ignore s’il l’a fait par le passé ; je suis certain qu’il fait tout autre chose

  1. La vérité purement doctrinale se trouve sauvent entre deux erreurs opposées. Ainsi la vérité sur les relations de l’Église avec l’État se trouve entre l’erreur de ceux qui confondent l’ordre spirituel et l’ordre temporel, et l’erreur des autres qui voudraient séparer complètement ces deux ordres. L’Église enseigne que l’État doit être uni et subordonné à l’Église, mais que le spirituel et le civil sont deux ordres distincts. Ou encore, la vérité se trouve entre l’erreur du traditionalisme, qui diminue outre mesure la puissance de la raison humaine, et l’erreur du rationalisme qui l’exalte à l’excès. Troisième exemple : la vérité sur le bonheur du ciel se trouve entre deux erreurs opposées, celle qui fait dériver presque entièrement, des créatures et des sens le bonheur des élus, et celle qui le fait consister exclusivement dans la vision béatifique sans que la gloire accidentelle provenant des créatures y soit pour rien. Dans cet article il s’agit de la vérité des jugements qu’il faut porter sur les hommes et les choses. Un auteur, un livre est bon ou il est mauvais, car du moment qu’il a du mauvais il est mauvais ; de même que la coupe empoisonnée est mauvaise quelle que soit la qualité du vin auquel le poison est mêlé.