Page:Tardivel - Mélanges, Tome I, 1887.djvu/296

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

nous donc de l’anglomanie, et sachons rendre justice à l’Angleterre et aux Anglais sans tomber dans le lyrisme.

Le système de gouvernement que « tous les peuples de l’Europe envient » à l’Angleterre, est certainement le système le plus illogique, le plus irraisonnable que l’esprit humain ait jamais inventé. Il a pu jusqu’ici fonctionner en Angleterre, parce que le peuple anglais n’est pas logique et ne tire pas immédiatement les dernières conséquences des faux principes qu’on lui enseigne. Mais lorsqu’on a voulu introduire ce fameux système chez un peuple latin, un peuple qui raisonne, il a aussitôt dégénéré en confusion. C’est que le célèbre axiome : « Le roi règne mais ne gouverne pas, » est un mensonge. Ou le roi règne et gouverne ; ou bien s’il ne gouverne pas il ne règne pas non plus. Un roi, un gouverneur, un président sans pouvoir, sans responsabilité, est une chose que les peuples logiques ne peuvent pas comprendre. Même le peuple anglais commence à voir clair. Et le développement graduel dont parle M. DeCelles est la force irrésistible de la logique qui pousse les Anglo-Saxons vers la forme républicaine À l’heure qu’il est, il n’y a qu’un simulacre de royauté en Angleterre. La reine ne règne pas plus qu’elle ne gouverne.

Les « principes » et les doctrines « politiques » de l’Angleterre ne sont pas destinés à devenir le code gouvernemental du monde civilisé, car si le monde dit civilisé ne les repousse pas et ne revient bientôt aux principes et aux doctrines de l’Église, qui, elle, enseigne que le pouvoir vient de Dieu et non d’ailleurs, ce monde si orgueilleux périra misérablement, comme a péri le monde romain.

Les hommes d’état anglais n’ont rien « formulé » de bon et de vrai, et s’il se trouve encore du bon et du vrai chez le peuple anglais, cela est tout simplement le dernier vestige de l’antique foi catholique dont les hommes d’état n’ont pu entièrement effacer le souvenir dans le cœur de la nation et au sein de la famille.