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MÉLANGES

dramaturge et qui manquent à M. Fréchette. De l’oreille et un peu de grammaire ne suffisent pas.

Le drame historique, tout en possédant des mérites purement littéraires, doit de plus nous représenter un événement digne d’admiration ou qui puisse, du moins, nous servir d’enseignement. Il faut, en outre, que cet événement soit représenté conformément à l’histoire. C’est un point incontestable, je crois.

Maintenant, dans son drame intitulé Papineau, M. Fréchette a-t-il choisi un épisode de notre histoire qui soit fécond en leçons utiles ? C’est la première question qu’il importe de résoudre.

Les troubles de 37 et de 38 sont peut-être ce qu’il y a de moins connu dans notre histoire. Plusieurs, sans se rendre compte de ce mouvement, s’imaginent qu’il était bien beau et que celui qui en fut l’âme est un véritable héros. Erreurs profondes. Le soulèvement de 37 était au fond une triste affaire, et l’homme qui le fomenta un triste personnage historique.

Je prévois à merveille la tempête que je me prépare, car je me souviens encore des torrents d’eau sale que l’on a versés sur la tête de ce malheureux Berger,[1] qui, pourtant, n’avait dit que la vérité. Mais les clameurs d’une certaine clique ne m’effraient pas, et aux gens de bonne foi qui ne manqueront pas de me blâmer je dirai d’avance : Étudiez l’histoire, sans parti pris, et vous serez forcés d’admettre que j’ai raison.

Dans son inexplicable zèle à défendre le drame de M. Fréchette, le Courrier de Montréal a lancé aux rédacteurs du Canadien l’apostrophe suivante :


Dites-donc, confrère, auriez-vous été bureaucrate en 1837 ? Voudriez-vous par hasard faire accroire que nous devons rougir de ceux qui ont versé leur sang pour conquérir les libertés dont nous jouissons ? Si le Canadien est aujourd’hui l’ennemi des patriotes, il a subi depuis 1837 une transformation qui n’est pas à son avantage.

  1. Sous ce nom de plume un correspondant du Canadien s’était élevé avec force contre l’espèce de culte que certaines gens rendaient à Papineau, mort sans sacrements et enterré dans son champ.