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Voilà à quoi se réduisent son étude et son esprit d’observation.

La platitude ici dorlote l’innocence.

La pièce de résistance est intitulée : En revenant des eaux. Il faut lire ce morceau en entier pour en saisir toute l’inénarrable inanité. C’est en revenant des eaux que M. Évanturel a

… rêvé des regards découpés en amande,


qu’il a adoré un œil battu, qu’il a demeuré sur le pont d’un bateau, une heure entière, par une pluie battante, sans l’ombre d’une raison ou d’un parapluie, et qu’il a commis mille autres folies, too numerous to mention, comme disent les encanteurs.

Avoir longtemps senti l’odeur de ses cheveux,


c’est ce qu’on fait à vingt ans, paraît-il, au bal.

Le poëte a fait un rêve qu’il s’empresse de raconter au public en le qualifiant de fort étrange. En effet, c’est un rêve assez curieux, puisqu’il rêvait qu’il rêvait. Après avoir parcouru, dans ce rêve rêvé, le monde parfait, en compagnie d’une jeune femme quelconque, à l’épaule de laquelle pendait une aile de duvet, il revient à lui, et

Je pressais sur mon cœur — c’est tout ce qui me reste,
Le rameau toujours vert de l’arbre de la foi,

Le poëte trouve qu’il ne lui reste pas grand’chose de son voyage. Je ne partage pas son opinion. Ce rameau me paraît unique, et si M. Évanturel voulait entrer en négociations avec Barnum, il pourrait vendre ce trophée, j’en suis convaincu, un prix fabuleux.

M. Évanturel a réimprimé ses Trois sonnets. Un homme qui a eu la faiblesse de faire un sonnet est tenu en honneur de le livrer au public. C’est la seule pénitence qui puisse racheter sa faute. À ce propos, je ferai remarquer, en passant, que M. Jacques Auger doit encore à son pays une amende honorable. Il a fait des sonnets qui n’ont pas vu le jour, si ce n’est dans