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OU RECUEIL D’ÉTUDES

Heureusement que le rédacteur de la Vérité s’enferre lui-même en citant intégralement notre article, qui est le plus inoffensif du monde et notre meilleure justification.

Il s’agit de notre récent article, sur le Courrier des États-Unis, et dans lequel nous faisons certaines « réserves » sur le choix des matières renfermées dans cette feuille.

Ces « réserves, » nous dit la Vérité, valent pour le Courrier plus qu’une réclame, où il n’y aurait que des éloges, parce qu’elles donnent à notre article « un air d’impartialité qui séduit. »

Si nos « réserves » peuvent produire cet effet, le rédacteur de la Vérité ne comprend-il pas que son propre article du 24 juin est encore bien plus dans le même cas ?

En nous annonçant que les feuilletons du Courrier des États-Unis sont obscènes, immondes, pourris, puants, notre confrère, en effet, court risque de provoquer la curiosité de ses lecteurs, et ceux-ci seront très probablement portés à imiter leur organe, à lire ces mêmes feuilletons pour juger par eux-mêmes comme le fait le rédacteur de la Vérité.

Pour ce qui nous regarde, nous ne savons pas si le Courrier des États-Unis se permet de publier des feuilletons obscènes et immondes, n’en lisant jamais et préférant la lecture sérieuse et utile, mais si ce journal en publie, n’est-il pas amusant d’apprendre que c’est dans cette espèce de littérature que le rédacteur de la Vérité passe une partie de son temps ?

La Vérité ne saurait s’abriter sous le prétexte que c’est pour jeter le cri d’alarme contre le danger des lectures immorales et en éloigner les lecteurs honnêtes.

L’écrivain de la Vérité n’a pas qualité pour cette fonction.

Il n’a pas encore reçu ces titres d’inquisiteur de la foi ou de la morale ; il n’est pas au milieu de nous, le délégué de la congrégation de l’Index, chargé d’examiner les productions littéraires, d’en prohiber ou d’en permettre la lecture et la vente.

Non, il n’est rien de tout cela ; il est tout simplement un profane comme nous, à qui il est défendu de lire tout mauvais livre, toute littérature obscène et immonde.

Si vous ne voulez pas que vos propres lecteurs lisent cette littérature pernicieuse, commencez donc par leur donner l’exemple et ne pas en lire vous-même !