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NAPOLÉON BONAPARTE


geon, cueilli dans leur forêt avant l’âge de l’affinement, de l’appauvrissement et de la décadence, a été transporté dans une pépinière semblable et lointaine où subsiste à demeure le régime tragique et militant ; le germe primitif s’y est conservé intact, il s’est transmis de génération en génération, il s’est renouvelé et fortifié par des croisements. À la fin, dans sa dernière pousse, il sort de terre et se développe magnifiquement, avec les mêmes frondaisons et les mêmes fruits qu’autrefois, sur la souche originelle ; la culture moderne et le jardinage français lui ont à peine élagué quelques branches, émoussé quelques épines : sa texture profonde, sa substance intime et sa direction spontanée n’ont point changé. Mais le sol qu’il rencontre en France et en Europe, défoncé par les orages de la Révolution,

    mêmes n’étaient pas suffisamment gardées ». Caroline, à Naples, « sans être plus scrupuleuse que ses sœurs », respecta mieux les convenances ; nulle ne fut plus semblable à l’Empereur ; « chez elle, tous les goûts se taisaient devant l’ambition » ; c’est elle qui conseilla et décida la défection de son mari Murat en 1814. Pour Pauline, la plus belle personne de son temps, « nulle femme, depuis celle de l’empereur Claude, ne l’a peut-être surpassée dans l’usage qu’elle a osé faire de ses charmes ; elle n’a pu en être détournée même par une maladie qu’on attribue aux fatigues de cette vie et pour laquelle nous l’avons vue si souvent portée en litière ». — Jérôme, « malgré l’audace peu commune de ses débauches, a gardé jusqu’au bout son ascendant sur sa femme ». — Sur « les empressements et les tentatives » de Joseph auprès de Marie-Louise en 1814, M. Pasquier, d’après les papiers de Savary et le témoignage de M. de Saint-Aignan, donne des détails extraordinaires. (Tome IV, 112.) — Mes souvenirs sur Napoléon, 346, par le comte Chaptal : « Tous les individus de cette nombreuse famille (Jérôme, Louis, Joseph, les sœurs de Bonaparte) sont montés sur les trônes comme s’ils avaient récupéré une propriété. »