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FORMATION ET CARACTÈRES DU NOUVEL ÉTAT


grand rets sous lequel, depuis Louis XIV, toutes les vies se trouvaient prises.

Néanmoins, dans ce réseau si étroitement serré, ils avaient laissé des lacunes, ou du moins des parties faibles. — Et d’abord, des trois principes qui, sous leur main, avaient déroulé leurs conséquences, il y en avait deux qui avaient empêché le troisième de dévider son écheveau jusqu’au bout : par cela seul que le roi avait été jadis comte de Paris et abbé de Saint-Denis, il ne pouvait devenir un Auguste véritable, un Dioclétien authentique : ses deux titres français limitaient son titre romain. Sans parler des lois, dites fondamentales, qui lui imposaient d’avance son héritier, toute la lignée de ses héritiers successifs, le tuteur ou la tutrice de son héritier mineur, et qui, s’il dérogeait à la règle immémoriale, cassaient son testament comme celui d’un simple particulier, sa qualité de suzerain et sa qualité de très chrétien étaient pour lui une double entrave. Comme général héréditaire de l’armée féodale, il devait de la considération et des égards aux officiers héréditaires de la même armée, à ses anciens pairs et compagnons d’armes, c’est-à-dire aux nobles. Comme évêque extérieur, il devait à l’Église, non seulement son orthodoxie spirituelle, mais encore ses ménagements tempo-

    comme de sages économes, c’est-à-dire suivant le besoin général de leur État. » — Sorel, l’Europe et la Révolution française, I, 231 (Lettre de l’intendant Foucault) : « C’est, une illusion, qui ne peut venir que d’une préoccupation aveugle, que de vouloir distinguer les obligations de la conscience d’avec l’obéissance qui est due au roi. »