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LA FIN DU GOUVERNEMENT RÉVOLUTIONNAIRE


pareils du 10 août, du 2 septembre, du 31 mai, comme le Comité de Salut public, gagner la partie.

Car, cette fois encore, les modérés ne veulent point comprendre que la guerre est déclarée et que c’est la guerre au couteau. Ils ne se mettent pas d’accord, ils atermoient, ils hésitent, ils s’enferment dans les formes constitutionnelles, ils n’agissent pas. Les mesures fortes, que proposent les quatre-vingts députés fermes et lucides, sont énervées ou suspendues par les ménagements des trois cents autres imprévoyants, incertains ou peureux[1]. Ils n’osent pas même user de leurs armes légales, casser la division militaire de l’intérieur, supprimer l’emploi d’Augereau, briser l’épée que les trois directeurs conjurés leur portent à la gorge. Dans le Directoire, ils n’ont que des alliés passifs ou neutres, Barthélemy, qui aime mieux être assassiné que meur-

  1. Mallet du Pan, II, 309, 316, 323, 324, 329, 333, 339, 347 : « Se défendre constitutionnellement, tandis que le Directoire attaque révolutionnairement, c’est se condamner à une perte inévitable. » — « Eût-il cent fois plus d’habileté, le Corps législatif sans audace est un éclair sans tonnerre. » — « Avec beaucoup plus de moyens que n’en avait Louis XVI en 1792, le Corps législatif se conduit comme ce prince et en aura le sort, s’il ne rend pas guerre pour guerre, s’il ne déclare traîtres à l’État les premiers généraux qui oseront expédier les délibérations de leurs armées. » — « C’est la temporisation des Conseils législatifs, c’est le funeste ajournement de l’attaque arrêtée sur le Luxembourg au milieu d’août, et sur laquelle insistaient Pichegru, Willot, le général Miranda, et tous les députés clairvoyants,… c’est l’imbécile insistance à se renfermer dans une défense constitutionnelle,… c’est la nécessité où se trouvaient quatre-vingts députés fermes et actifs de se concilier avec trois cents autres désunis dans le but comme dans les moyens, qui a décidé de la catastrophe des Conseils. »