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LA FIN DU GOUVERNEMENT RÉVOLUTIONNAIRE


se soustraire, et les Montagnards lui font horreur ; d’autant plus qu’elle a des rancunes : les soixante-treize détenus et les seize proscrits qui ont repris leurs sièges, les quatre cents muets qui ont si longtemps siégé sous le couteau, se souviennent de l’oppression qu’ils ont subie, et ils se redressent, d’abord contre les scélérats les plus souillés, ensuite contre les membres des anciens comités. — Là-dessus, selon sa coutume, la Montagne, dans les émeutes de germinal et de prairial an III, lance ou soutient sa clientèle ordinaire, la populace affamée, la canaille jacobine, et proclame la restauration de la Terreur ; de nouveau, la Convention se sent sous la hache. — Sauvée par les jeunes gens et par la garde nationale, elle prend enfin courage à force de peur, et à son tour elle terrorise les terroristes : le faubourg Saint-Antoine est désarmé, dix mille Jacobins sont arrêtés, plus de soixante Montagnards sont décrétés d’accusation ; on décide que Collot d’Herbois, Barère, Billaud-Varennes et Vadier seront déportés ; neuf autres membres des anciens comités sont mis en prison ; les derniers des vrais fanatiques, Romme, Goujon, Soubrany, Duquesnoy, Bourbotte et Du Roy, sont condamnés à mort ; aussitôt après la sentence, dans l’escalier du tribunal, cinq d’entre eux se poignardent ; deux blessés qui survivent sont portés à l’échafaud et guillotinés avec le sixième ; deux autres Montagnards de la même trempe, Ruhl et Maure, se tuent avant la sentence[1]. — Désormais la Convention épurée

  1. Décret du 12 germinal an III : Collot, Barère, Billaud-Varennes et Vadier seront déportés ; huit Montagnards seront mis en état