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LES GOUVERNÉS


ou nature, quelle qu’en soit la forme, terres, bâtisses, mines et canaux, navires, machines, animaux et outils, marchandises et provisions de toute espèce. — Et voyez l’usage qu’ils en font. Chacun d’eux, ayant prélevé la réserve dont il a besoin pour sa consommation du moment, met dans quelque entreprise son surplus disponible : le capitaliste, ses capitaux liquides ; le propriétaire foncier, sa terre et ses bâtiments de ferme ; le fermier, ses bestiaux, ses semences et ses instruments de culture ; le manufacturier, son usine et ses matières premières ; l’entrepreneur de transports, ses navires, ses voitures et ses chevaux ; le négociant, ses magasins et son approvisionnement de l’année ; le détaillant, sa boutique et son approvisionnement de la quinzaine ; à quoi tous ceux-ci, l’agriculteur, le commerçant, l’industriel, sont tenus par surcroît d’ajouter de l’argent comptant, l’argent qu’il leur faut pour payer, à la fin de chaque mois, les appointements de leurs commis et, à la fin de chaque semaine, le salaire de leurs ouvriers. — Sinon, impossible de cultiver, construire, fabriquer, transporter, étaler et vendre ; quelle que soit l’œuvre utile, on ne peut l’exécuter, ni même la commencer, sans fournitures préalables en argent ou en nature ; en toute entreprise, la récolte présuppose le labour et les semailles ; si je veux creuser un trou, je suis obligé de louer une pioche et une paire de bras, en d’autres termes de faire des avances. Mais les avances ne se font qu’à deux conditions : il faut d’abord que celui qui les a puisse les faire, c’est-à-dire qu’il ait un surplus