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LA RÉVOLUTION


nobles et les prêtres, mais tous les membres d’une profession bourgeoise ou même d’un métier presque manuel. À Strasbourg, un peu plus tard, « considérant que la soif de l’or a toujours guidé les brasseurs de la commune », on « les condamne à 250000 livres d’amende, qu’ils doivent payer dans les trois jours, sous peine d’être déclarés rebelles à la loi, et de voir leurs biens confisqués » ; puis, sur un considérant semblable, on taxe les boulangers et fariniers à 300000 livres[1]. De plus, écrivent les représentants Milhaud et Guyardin[2], « nous avons ordonné l’arrestation de tous les banquiers, agents de change et notaires… Toutes

  1. Recueil de pièces, etc., I, 16.
  2. Ib., I, 159 (Arrêté du 15 brumaire an II). — Ludovic Sciout, IV, 87, 147 (Lettre de Maignet en mission à Marseille) : « La guillotine a expédié aujourd’hui et hier quarante-trois scélérats qui ont laissé à la république près de 30 millions. » — (Paroles de Baudot, revenu de Bordeaux, dans la séance de la Convention du 12 brumaire an II) : « Nous avons fait punir (guillotiner) le maire de Bordeaux (M. Saige), riche de 10 millions. » — Camille Boursier, Essai sur la Terreur en Anjou, 79 (Extrait du registre des délibérations du directoire du département de la Mayenne) : « Pierre Dubignon était en correspondance avec les brigands de la Vendée ; pour surcroît de suspicion, le dénoncé possède, en propriétés foncières, mobilières et commerciales, au moins 40000 livres de rente. » (Guillotiné le 20 frimaire an II.) — « Dumans-Chalais,… 20000 livres de rente sont les garants de ses projets liberticides. » (Guillotiné de même.) — « Leclerc de la Raugère possède 40000 livres de rente ; égoïste, par conséquent… Monfrand fils, frère d’un émigré, suspect à ce titre, est de plus propriétaire d’un revenu de 30 à 40000 livres de rente. » — Dufort de Cheverny (Mémoires manuscrits, derniers mois de 1794). — Sorti de prison et demi-ruiné, il conduit à Cheverny Laurenceot, député, l’un des soixante-treize. Celui-ci, « dès qu’il eut vu la beauté de l’habitation, s’écria, avec une naïveté pénétrante : Comment ! vous vivez encore ! »