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LA RÉVOLUTION


— Parmi ces malheureux, il y a des enfants, et non pas seulement dans les prisons de Nantes, où les battues révolutionnaires ont ramassé toute la population des campagnes ; dans les prisons d’Arras[1], entre vingt cas semblables, je trouve un marchand de charbon et sa femme, avec leurs sept fils et filles âgés de dix-sept à six ans ; une veuve, avec ses quatre enfants âgés de dix-sept à douze ans ; une autre veuve noble, avec ses neuf enfants âgés de dix-sept à trois ans ; six enfants de la même famille, sans père ni mère, âgés de vingt-trois à neuf ans. — Presque partout, ces prisonniers d’État sont traités comme on ne traitait pas les voleurs et les assassins sous l’ancien régime. Pour commencer, on les soumet « au rapiotage », je veux dire qu’on les met nus, ou que du moins on les fouille jusque sous la chemise et par tout le corps ; des femmes, des filles s’évanouissent sous cette perquisition qu’on réservait jadis aux galériens pour leur entrée au bagne[2]. — Souvent, avant de les

    leur commune ou ajournées, en tout, 608 000 personnes atteintes dans leur liberté. Les deux premières catégories forment un total de 433 000 personnes, chiffre assez voisin de celui de Beaulieu.

  1. Paris, Histoire de Joseph Lebon, II, 371, 372, 375, 377, 379, 380. — Les Angoisses de la mort, par Poirier et Montgey de Dunkerque (2e édition, an III). « Il restait encore, dans les maisons des détenus, leurs enfants et leurs personnes de confiance ; ils ne furent pas plus épargnés que nous… Nous vîmes arriver de toutes parts des enfants depuis l’âge de 5 ans, et pour les soustraire à l’autorité paternelle, on leur envoyait, de temps en temps, des commissaires qui leur tenaient un langage immoral. »
  2. Mémoires sur les prisons (collection Barrière et Berville), II, 354, et appendice F. — Ib., II, 261, 262. « Les femmes furent les