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LES GOUVERNANTS


tumé à traiter un nègre comme un animal, et un Français comme un nègre blanc, septembriseur par principes, principal instigateur et directeur des noyades, va, de sa personne, vider la prison du Bouffay, et, vérifiant que la mort, l’hôpital ou l’élargissement lui ont soustrait des détenus, il ajoute, de sa seule autorité, quinze noms, pris au hasard, pour atteindre son chiffre. — Un autre, Jolly, commissaire du comité, très expert dans l’art de garrotter, liait lui-même les détenus, deux à deux, pour les conduire à la rivière[1]. — Grandmaison, membre du comité, ancien maître d’armes, condamné et gracié, avant la Révolution, pour deux meurtres, abattait à coups de sabre les mains suppliantes qui se tendaient vers lui à travers les planches de la gabare[2]. — Pinard, autre commissaire du comité, rançonnait, volait dans la campagne, et tuait lui-même les femmes et les enfants, de préférence[3]. — Naturellement, les trois troupes qui opèrent avec eux, ou sous leurs ordres, ne comprennent que des hommes de leur espèce. — Dans la première, appelée Compagnie Marat, chacun

    teur des vivres militaires. « Après la déroute de Clisson, dit la femme Laillet, il se présenta à la Société populaire avec l’oreille d’un brigand qu’il avait attachée à son chapeau, en guise de cocarde. Il avait les poches pleines de ces oreilles, qu’il se faisait un plaisir de faire baiser aux femmes. » — Il montrait et faisait baiser encore autre chose, et la femme Laillet ajoute un détail que je n’ose pas transcrire. (Le Patriote d’Héron, par L. de la Sicotière, 9 et 10, Déposition de la femme Laillet, poissonnière, et témoignage de Mellinet, tome VIII, 256.)

  1. Wallon, V, 368 (Déposition de Lacaille).
  2. Ib., V, 371 (Déposition de Tabouret).
  3. Ib., V, 373 (Déposition de Mariotte).