Page:Taine - Les Origines de la France contemporaine, t. 7, 1904.pdf/79

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
 Les corrections sont expliquées en page de discussion
71
LE GOUVERNEMENT RÉVOLUTIONNAIRE


« que son indépendance soit reconnue ». Cela signifie[1] que la période des phrases hypocrites est finie, que la Constitution n’était qu’une enseigne de foire, que les charlatans qui en ont fait parade n’en ont plus besoin, qu’ils la remisent dans les magasins des vieilles affiches, que les libertés privées et publiques, locales et parlementaires sont abolies, que le gouvernement est arbitraire et absolu, que nulle institution, loi, principe, dogme ou précédent ne garantit plus contre lui les droits de l’individu ni les droits du peuple, que tous les biens et toutes les vies sont à sa discrétion, qu’il n’y a plus de droits de l’homme. — Six semaines après, lorsque, par la proscription des soixante-sept et par l’arrestation des soixante-treize, l’obéissance de la Convention est assurée, tout cela se débite à la tribune, effrontément et officiellement. « Dans les circonstances où se trouve la République, dit Saint-Just, la Constitution ne peut être établie ; elle deviendrait la garantie des attaques contre la liberté, parce qu’elle manquerait de la violence nécessaire pour les réprimer. » Il ne s’agit plus de

  1. Moniteur, XVII, 519. — Le sens et les motifs de cette déclaration sont indiqués nettement dans le discours de Basire. « Depuis l’acceptation de la Constitution, dit-il, le Feuillantisme a relevé la tête ; il s’est élevé une lutte entre les patriotes énergiques et les modérés. À la fin de l’Assemblée constituante, les Feuillants s’étaient emparés des mots loi, ordre public, paix, sûreté, pour enchaîner le zèle des amis de la liberté ; les mêmes manœuvres sont employées aujourd’hui. Vous devez briser entre les mains de vos ennemis l’arme qu’ils emploient contre vous. » — Durand de Maillane, 154. « La simple exécution des lois constitutionnelles, disait Basire, faite pour un temps de paix, serait impuissante au milieu des conspirations qui nous entourent. » — Meillan, 108.