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LA RÉVOLUTION


l’opération recommence : Fréron écrit, le 16 nivôse, « qu’il y a déjà 800 Toulonnais de fusillés ». — « Fusillade, dit-il dans une autre lettre, et fusillade encore, jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de traîtres. » Ensuite, pendant les trois mois qui suivent, la guillotine expédie 1800 personnes ; onze jeunes femmes montent à la fois sur l’échafaud, pour célébrer une fête républicaine ; un vieillard de quatre-vingt-quatorze ans y est porté sur une chaise à bras ; et de vingt-huit mille habitants, la population tombe à six ou sept mille.

Tout cela ne suffit pas ; il faut que les deux cités qui ont osé soutenir un siège disparaissent du sol français. La Convention décrète que « la ville de Lyon sera détruite[1] ; tout ce qui fut habité par des riches sera démoli ; il ne restera que la maison du pauvre, les habitations des patriotes égorgés ou proscrits, les édifices spécialement employés à l’industrie, les monuments consacrés à l’humanité et à l’instruction publique ». — Pareillement, à Toulon[2], « les maisons de l’intérieur seront rasées ; il n’y sera conservé que les établissements nécessaires au service de la guerre et de la marine, des subsistances et des approvisionnements ». En conséquence, 12 000 maçons sont requis dans le Var, et dans les départements voisins, pour raser Toulon. — À Lyon, 14 000 ouvriers jettent à bas le château de

    360. Lettres de Fréron ; témoignages de Toulonnais survivants et témoins oculaires. — Lauvergne, Histoire du département du Var,

  1. Buchez et Roux, XXIX, 192 (Décret du 12 octobre).
  2. Ib., XXX, 457 (Décret du 24 décembre).