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LES GOUVERNANTS


puis les soixante-treize membres du côté droit raflés en un jour et déposés à la Force, ensuite des Jacobins marquants, Osselin arrêté le 19 brumaire, Basire, Chabot et Delaunay décrétés d’accusation le 24 brumaire, Fabre d’Églantine arrêté le 24 nivôse, Bernard guillotiné le 3 pluviôse, Anacharsis Clootz guillotiné le 4 germinal, Hérault de Séchelles, Lacroix, Philippeaux, Camille Desmoulins, Danton guillotinés, avec quatre autres, le 10 germinal ; Simond guillotiné le 24 germinal, Osselin guillotiné le 28 messidor. — Naturellement les demeurants sont avertis et prennent garde. À l’ouverture de la séance on les voit entrer dans la salle, l’air inquiet, « pleins de défiance[1] », comme des animaux qu’on pousse dans un enclos et qui soupçonnent un piège. « Chacun d’eux, écrit un témoin, observait ses démarches et ses paroles, de crainte qu’on ne lui en fit un crime : en effet, rien n’était indifférent, la place où l’on s’asseyait, un regard, un geste, un murmure, un sourire. » C’est pourquoi, et d’instinct, le troupeau se porte du côté qui semble le mieux abrité, vers la gauche. « Tout refluait vers le sommet de la Montagne ; le côté droit était désert… Plusieurs ne prenaient pied nulle part, et pendant la séance changeaient souvent de place, croyant ainsi tromper l’espion et, en se donnant une

  1. Thibaudeau, Mémoires, I, 47, 70. — Durand de Maillane, Mémoires, 183. — Vatel, Charlotte Corday et les Girondins, II, 269. Sur 76 présidents qu’a eus la Convention, 18 ont été guillotinés, 8 déportés, 22 mis hors la loi, 6 incarcérés, 3 se sont suicidés, 4 sont devenus fous ; en tout 61. Tous ceux qui ont été présidents deux fois ont péri de mort violente.