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LA RÉVOLUTION


« un sujet bien traité, ni à ressasser les ouvrages des autres ». — Partant, lorsqu’il essaye d’inventer, copie ou il se trompe. Son traité de l’Homme est un pêle-mêle de lieux communs physiologiques et moraux, de lectures mal digérées, de noms enfilés à la suite et comme au hasard[1], de suppositions gratuites, incohérentes, où les doctrines du dix-septième et du dix-huitième siècle s’accouplent, sans rien produire que des phrases creuses. « L’âme et le corps sont des substances distinctes, sans nul rapport nécessaire, et uniquement unies entre elles par le fluide nerveux ; » ce fluide n’est pas gélatineux, car les spiritueux qui le renouvellent ne contiennent pas de gélatine ; l’âme est mue par lui et le meut ; à cet effet, elle réside dans « les méninges ». — Son Optique[2] est le contre-pied de la grande vérité déjà trouvée par Newton depuis un siècle et vérifiée depuis par un autre siècle d’expériences et de calculs. — Sur la chaleur et l’électricité, il ne produit que des hypothèses légères et des généralités littéraires : un jour, mis au pied du mur, il introduit une aiguille dans un bâton de résine pour le rendre conducteur, et il est pris par le physicien Charles en flagrant délit de

  1. Préface, XX : « Descartes, Helvétius, Haller, Le Cat ont tous « ignoré les grands principes ; on les voit faire de la connaissance de l’homme une énigme, un secret impénétrable. » En note : « On en voit les preuves dans les ouvrages des Hume, des Voltaire, des Bonnet, des Racine, des Pascal. »
  2. Mémoires académiques sur la Lumière, préface, VII. — Il combat notamment « la différente réfrangibilité des rayons hétérogènes », qui est la base de la théorie de Newton.