Page:Taine - Les Origines de la France contemporaine, t. 7, 1904.pdf/187

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
179
LE PROGRAMME JACOBIN


au nom de la communauté, avec les corps locaux ou spéciaux, départements, communes, banques, instituts, églises, universités. — Ajoutez-y, selon les circonstances, quelques collaborations facultatives et variables[1] : tantôt des subventions accordées aux institutions très utiles que les souscriptions privées ne suffisent pas à défrayer ; tantôt des privilèges concédés à des compagnies auxquelles en échange on impose des obligations équivalentes ; souvent des précautions d’hygiène que l’insouciance des particuliers les empêche de prendre ; parfois des assistances provisoires qui, soutenant ou éveillant l’homme, le mettent un jour en état de se passer d’assistance ; en général des interventions discrètes et peu sensibles dans le présent, mais de grande conséquence dans l’avenir, un code à longue portée, un ensemble de directions coordonnées qui, tout en ménageant la liberté des individus vivants, préparent le bien-être des générations lointaines. — Rien au delà.

  1. Quand la fonction à remplir est d’un caractère incertain ou d’un genre mixte, on peut appliquer la règle suivante, pour décider si elle doit être exercée par l’État ou par les particuliers, et pour démêler, en cas de collaboration, quelle portion revient aux particuliers, et quelle portion à l’État. — Règle générale, si une fonction a pour des particuliers isolés ou associés un intérêt et un attrait directs, et pour la communauté un intérêt indirect, elle convient et appartient aux particuliers, non à l’État. Au contraire, si la fonction a pour la communauté un intérêt direct, et pour les particuliers isolés ou associés un intérêt et un attrait indirects, elle convient et appartient à l’État, non aux particuliers. — D’après cette règle, on peut tracer la limite du domaine privé et du domaine public, et l’on constate que cette limite se déplace en avant ou en arrière, selon le déplacement des intérêts et des attraits, directs et indirects.