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LA RÉVOLUTION


le droit de prendre le superflu où il se trouve, non seulement aujourd’hui, parce que nous en avons besoin aujourd’hui pour l’État et pour les pauvres, mais en tout temps, parce que le superflu en tout temps confère au possesseur un ascendant dans les contrats, une autorité sur les salaires, un arbitraire sur les subsistances, bref une suprématie de condition pire que la prééminence de rang. Ainsi, ce n’est pas seulement aux nobles, c’est aux bourgeois riches ou aisés[1], c’est aux propriétaires et capitalistes que nous en voulons ; nous allons démolir de fond en comble leur féodalité sournoise[2]. — D’abord, et par le seul jeu des institutions nouvelles, nous empêchons le rentier de prélever, comme à son ordinaire, la meilleure part dans les fruits du travail d’autrui ; les frelons ne mangeront plus, chaque année, le miel des abeilles. Pour en arriver là, il n’y a qu’à laisser agir les assignats et le cours forcé. Par la dépré-

  1. Archives nationales, F7 4437 (Adresse de la Société populaire de Calvisson (Gard), 7 messidor an II). « Les bourgeois, les marchands, les gros propriétaires ont toute la prétention des ci-devant. La loi ne fournit aucun moyen de dessiller les yeux des gens du peuple sur le compte de ces nouveaux tyrans. La Société désirerait qu’on attribuât au Tribunal révolutionnaire le droit de condamner à une détention momentanée cette classe d’individus orgueilleux. Le peuple verrait qu’ils ont commis un délit et reviendrait de l’espèce de respect qu’il a pour eux. » — En note, de la main de Couthon : « Renvoyer au jugement des commissions populaires. »
  2. Gouverneur Morris (Lettre du 4 janvier 1796). « Les capitalistes en France ont été détruits pécuniairement par les assignats, et physiquement par la guillotine. » — Buchez et Roux, XXX, 26 (Notes écrites par Robespierre en juin 1793). « Les dangers intérieurs viennent des bourgeois… Quels sont nos ennemis ? Les hommes vicieux et les riches. »