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LE PROGRAMME JACOBIN


d’approvisionner le peuple que de le défendre. C’est pourquoi nous mettons « en réquisition tous ceux qui contribuent à la manipulation, au transport et au débit des denrées et marchandises de première nécessité[1] », notamment des combustibles et des subsistances, bûcherons, charretiers, flotteurs, meuniers, moissonneurs, batteurs en grange, botteleurs, faucheurs, laboureurs, « gens de la campagne » de toute espèce et de tout degré. Ils sont nos manœuvres ; nous les faisons marcher et travailler sous peine de prison et d’amende. Plus de paresseux, surtout quand il s’agit de la récolte ; nous menons aux champs la population entière d’une commune ou d’un canton, y compris « les oisifs et les oisives[2] » ; bon gré mal gré, ils moissonneront sous nos yeux, en bande, chez autrui comme chez eux, et rentreront indistinctement les gerbes dans le grenier public.

Mais tout se tient dans le travail, depuis l’œuvre initiale jusqu’à l’œuvre finale, depuis la matière la plus brute jusqu’au produit le plus élaboré, depuis le grand entrepreneur jusqu’au détaillant infime ; quand on a mis la main sur le premier anneau de la chaîne, il faut

  1. Décret des 15-18 floréal. — Décret du 29 septembre 1793. (Énumération de quarante objets de première nécessité.) — L’article 9 décrète trois jours de prison contre les ouvriers et fabricants qui « se refuseront, sans causes légitimes, à leurs travaux ordinaires ». — Décrets des 16 et 20 septembre 1793, et décret du 11 septembre, articles 1, 6, 19, 20 et 21.
  2. Archives nationales, AF, II, 111 (Arrêté du représentant Ferry, Bourges, 23 messidor an II. — Ib., AF, II, 106 (Arrêté du représentant Dartigoeyte, Auch, 28 floréal an II).