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LA PREMIÈRE ÉTAPE DE LA CONQUÊTE


l’autre, et, si les Girondins ne peuvent régner par lui, ils régneront sans lui. Au nom de la Commune, Pétion en personne vient proposer le nouveau plan et réclamer la déchéance. « Cette grande mesure adoptée[1], dit-il, comme il est très douteux que la nation puisse avoir confiance en la dynastie actuelle, nous demandons que des ministres solidairement responsables, nommés par l’Assemblée nationale, mais, selon la loi constitutionnelle, hors de son sein, nommés par le scrutin des hommes libres votant à haute voix, exercent provisoirement le pouvoir exécutif. » Par ce vote à haute voix, on espère bien maîtriser les suffrages ; ce ne sera qu’un décret de plus extorqué comme tant d’autres, et depuis longtemps la majorité subit la même pression que le roi. « Si vous vous refusez à nos vœux, disait déjà un placard du 23 juin, nos bras sont levés, et nous frapperons les traîtres partout où ils se trouveront, même parmi vous[2]. » — « Il siège parmi vous, dit une pétition du 6 août, des favoris de la cour ; périsse leur inviolabilité, si elle avait toujours le pouvoir funeste d’entraver impunément la volonté nationale ! » — Dans l’Assemblée, les vociférations des galeries sont effroyables, la voix des orateurs qui parlent contre la déchéance est étouffée ; à force de huées, ils sont chassés de la tribune[3]. Parfois le côté droit renonce

  1. Moniteur, XIII, 325, séance du 3 août.
  2. Moniteur, XII, 340 : XII, 738.
  3. Moniteur, XIII, 170, 171, 187, 208, 335, séances des 17, 18, 23 juillet, 5 août.