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LA PREMIÈRE ÉTAPE DE LA CONQUÊTE


l’expédition, qui est un sabbat, finit par un carnaval. Des deux divisions marseillaises, l’une, ramenée à Aix, s’attable à un grand festin « patriotique », puis danse des farandoles, dont « la principale est menée par M. Le maire et par M. le commandant[1] » ; l’autre, presque le même jour, avec une allégresse et une pompe encore plus grandes, fait son entrée dans Avignon.

IV

Il n’y a pas en France un nid de brigands pareil : non qu’une misère plus grande ait produit là une jacquerie plus sauvage ; au contraire, avant la Révolution, le Comtat était un pays de cocagne : le pape n’y levait point d’impôts ; les taxes, très légères, se dépensaient sur place ; « pour 1 sol ou 2, on y avait pain, vin et viande[2] ». — Mais, sous l’administration indulgente et

    300 livres pour frais de séjour et retards. — Pétition des rançonnés, 21 novembre 1792.

  1. Archives nationales, F7, 3195. Procès-verbal du directoire sur les événements arrivés à Aix les 27, 28 et 29 avril 1792.
  2. Michelet, Histoire de la Révolution française, III, 56 (d’après les récits de vieux paysans) — Mercure de France, no du 30 avril 1791. Lettre d’un habitant du Comtat. — Toutes les charges publiques ensemble (octrois et intérêts de la dette) ne dépassaient pas 800 000 livres pour 126 684 habitants. Au contraire, si le Comtat : est réuni à la France, il payera 3 793 000 livres. — André, Histoire de la Révolution avignonnaise, I, 61. Le Comtat avait des institutions représentatives, une assemblée générale annuelle, composée de 3 évêques, de l’élu de la noblesse et de 13 consuls des principales villes. — Mercure de France, no du 15 octobre 1791. (Lettre d’un Comtadin.) Il n’y avait point de milices dans le Comtat ; les privilèges nobiliaires étaient médio-