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LA PREMIÈRE ÉTAPE DE LA CONQUÊTE


Monnaidiers, réparé leurs remparts, coupé leurs ponts, et montent la garde, le fusil chargé[1]. — Mais ce n’est que partie remise. À présent que les commissaires sont partis, que l’autorité du roi est un fantôme, que le dernier régiment fidèle a été désarmé, que le directoire, refondu et terrifié, obéit comme un domestique, et que l’Assemblée législative laisse partout opprimer les constitutionnels par les Jacobins, on peut impunément recommencer contre des constitutionnels une expédition jacobine, et, le 23 mars 1792, l’armée marseillaise, 4500 hommes, se met en marche avec 19 pièces de canon.

En vain les commissaires des départements voisins, envoyés par le ministre, leur représentent que maintenant Arles s’est soumise, qu’elle a déposé ses armes, qu’elle est occupée par une garnison de ligne ; les Marseillais exigent que cette garnison soit retirée. — En vain la garnison se retire ; Rébecqui et ses acolytes répliquent que « rien ne les détournera de leur entreprise, qu’ils ne peuvent s’en rapporter qu’à eux-mêmes des précautions qu’ils ont à prendre pour la sûreté

  1. Archives nationales, F7, 3198. Procès-verbal des officiers municipaux d’Arles sur l’insurrection des Monnaidiers, 2 septembre 1791. — Lettres de Ripert ; commissaire du roi, 2 et 8 octobre. — Lettre de M. d’Antonelle aux Amis de la Constitution, 22 septembre : « Je ne veux pas croire au contre-ordre dont on nous menace. Une telle détermination, dans la crise actuelle, serait trop inhumaine et trop dangereuse : elle ôterait l’asile et le pain à ceux de nos ouvriers qui ont eu le courage de se dévouer à la nouvelle loi… La proclamation du roi paraît faite à la hâte et porte tous les caractères de la surprise. »