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LA PREMIÈRE ÉTAPE DE LA CONQUÊTE


met en vente les palais épiscopaux, les maisons encore occupées par des religieux ou des religieuses[1]. Elle accueille par des acclamations un prêtre marié qui lui présente sa femme. — Non seulement elle détruit, mais encore elle insulte, et les auteurs de chaque décret qui passe ajoutent à son coup de foudre la grêle retentissante de leurs injures et de leurs diffamations. « Les congrégations dit un député, insinuent dans l’esprit des enfants le poison de l’aristocratie et du fanatisme[2]. » — « Purgez les campagnes, dit Lagrévol, de cette vermine qui les dévore. » — « Chacun sait, crie Isnard, que le prêtre est aussi lâche qu’il est vindicatif… Renvoyez ces pestiférés dans les lazarets de Rome et de l’Italie… Qu’est-ce qu’une religion insociable par nature et rebelle par principe ? ». — Insermentés, émigrés de fait, émigrés de cœur, « gros propriétaires, riches négociants, faux modérés[3] », tous sont des conspirateurs déclarés ou des ennemis cachés. On leur impute tous les désastres publics. « La cause des troubles qui désolent les colonies, dit Brissot[4], c’est l’infernale vanité des blancs, qui trois fois ont violé un concordat que trois fois ils avaient juré de maintenir. » On l’explique par leur malveillance calculée le

  1. Décrets du 19 juillet et du 4 août, complétés par ceux du 16 et du 19 août.
  2. Moniteur, XII, 59, 61, séance du 3 avril ; X, 374, séance du 13 novembre ; XII, 230, séance du 26 avril. — La dernière phrase citée est de Français de Nantes.
  3. Ib., XI, 43, séance du 5 janvier. Discours d’Isnard.
  4. Ib., XI, 356, séance du 10 février.