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LA CONSTITUTION APPLIQUÉE


« licence, du mépris de toutes les autorités, et conséquemment de l’impossibilité absolue de remplir les fonctions qui nous sont confiées. » — Le directoire des Bouches-du-Rhône, envahi, s’enfuit devant les baïonnettes de Marseille. Le directoire du Gers, en conflit avec la municipalité d’Auch, est presque assommé. — Quant aux ministres, suspects par institution, ils sont encore moins respectés que les directoires. Incessamment on les dénonce à l’Assemblée ; des municipalités leur renvoient leurs lettres, sans avoir daigné les décacheter[1] ; et, vers la fin de 1791, leur impuissance croissante arrive à l’anéantissement parfait. Qu’on en juge par un seul exemple. — Au mois de décembre 1791, Limoges ne peut enlever les grains qu’elle vient d’acheter dans l’Indre ; il faudrait soixante cavaliers pour en protéger le transport et le directoire de l’Indre demande instamment aux ministres de lui procurer cette petite troupe[2]. Après trois semaines d’efforts, le ministre répond que la chose est au delà de son pouvoir : il a frappé inutilement à toutes les portes. « J’ai indiqué, dit-il, à MM. les députés de votre département à l’Assemblée nationale un moyen qui consisterait à retirer d’Orléans la compagnie du 20e régiment de cavalerie, et je les ai engagés à traiter cet objet avec MM. les députés du Loiret. » Pas de réponse encore ; il faut que les députés des deux départements soient tombés d’accord, sinon le

  1. Mercure de France, n° du 30 octobre 1790.
  2. Archives nationales, F7, 3226. Lettre du directoire de l’Indre à M. Cahier, ministre, 6 décembre 1791. — Lettre de M. de Lessart, ministre, au directoire de l’Indre, 31 décembre 1791.