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LA CONSTITUTION APPLIQUÉE


leur départ, on ne peut se méprendre. « Quiconque considérera impartialement les seules et véritables causes de l’émigration, dit un honnête homme, les trouvera dans l’anarchie. Si la liberté individuelle n’était pas journellement menacée, si, » dans l’ordre civil comme dans l’ordre militaire, « l’on n’avait pas mis en pratique le dogme insensé, prêché par les factieux, que les crimes de la multitude sont les jugements du ciel, la France eût conservé les trois quarts de ses fugitifs. Exposés depuis deux ans à des dangers ignominieux, à des outrages de tout genre, à des persécutions innombrables, au fer des assassins, au brandon des incendiaires, aux plus infâmes délations », aux dénonciations de « leurs serviteurs corrompus, aux visites domiciliaires » provoquées par le premier bruit de la rue, « aux emprisonnements arbitraires du Comité des recherches », privés de leurs droits civiques, chassés des assemblées primaires, « on leur demande compte de leurs murmures, et on les punit d’une sensibilité qui toucherait en des animaux souffrants ». — « Aucune résistance ne s’est présentée ; depuis le trône du prince jusqu’au pres-

    bre 1791 (Articles de Mallet du Pan). — Ib., 14 avril 1792. Plus de 600 officiers de marine ont donné leur démission, après l’insurrection de l’escadre de Brest. « Vingt-deux faits d’insurrection capitale dans les ports sont restés impunis, plusieurs par sentence du jury maritime. » — « Il est sans exemple qu’aucune insurrection, dans les ports ou sur les vaisseaux, qu’aucun attentat contre les officiers de marine ait été puni… Il ne faut pas chercher ailleurs la cause de l’abandon du service par les officiers de marine. D’après leurs lettres, tous offrent leur sang à la France, mais refusent de commander à qui n’obéit pas. »