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LA RÉVOLUTION


a répondu : « En ce cas, vous êtes des nôtres, vous êtes bien plus aristocrate que vous ne pensez. » Effectivement, toute leur aristocratie consiste à empêcher le brigandage. Nulle prétention n’est plus révoltante, puisqu’elle oppose une barrière à l’arbitraire d’un parti qui se croit tout permis. — Le 4 octobre, le régiment d’Aunis a quitté la ville, et les honnêtes gens sont livrés à la milice, « habillée ou non », qui seule est en possession des armes. Ce jour-là, pour la première fois depuis longtemps, M. Bunel, ancien curé de Saint-Jean, avec l’autorisation et l’assistance de son successeur assermenté, a dit la messe : grand concours d’orthodoxes ; cela inquiète les patriotes. Le lendemain, M. Bunel doit encore dire la messe ; par l’organe de la municipalité, les patriotes lui défendent d’officier ; il se soumet. — Mais, faute d’avertissement, une foule de fidèles sont arrivés, et, l’église est pleine. Attroupement dangereux ; les patriotes et les gardes nationaux arrivent « pour rétablir l’ordre » qui n’est pas troublé, et ils le troublent. Des propos menaçants sont échangés entre les domestiques des nobles et la garde nationale. Celle-ci dégaine ; un jeune homme est sabré, foulé aux pieds ; M. de Saffray, qui vient sans armes à son secours, est sabré lui-même, percé de baïonnettes ; deux autres sont blessés. — Cependant, dans une rue voisine, M. Achard de Vagogne, voyant des gens armés maltraiter un homme, approche pour mettre la paix ; l’homme est tué d’un coup de fusil ; M. Achard est criblé de coups de baïonnette et de sabre ; « il n’y a pas un fil