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LA RÉVOLUTION


les autres, et la cupidité limitée du censitaire s’achève par la rapacité illimitée du brigand.

Cependant, dans les provinces du Sud-Ouest, les mêmes causes ont produit les mêmes effets, et, vers la fin de l’automne, quand, la récolte faite, les propriétaires ont demandé leurs rentes en argent ou en nature, le paysan, immuable dans son idée fixe, a de nouveau refusé[1]. À l’entendre, s’il y a une loi contre lui, elle n’est pas de l’Assemblée nationale ; ce sont les ci-devant seigneurs qui l’ont extorquée ou fabriquée ; elle est donc nulle. Que les administrateurs du département et du district la proclament autant de fois qu’ils voudront ; il n’en a cure, et, à l’occasion, il saura bien les en punir. Composées de censitaires comme lui, les gardes nationales de village sont avec lui, et, au lieu de le réprimer, le soutiennent. Pour commencer, il replante les Mais en signe d’affranchissement et les potences en signe de menace. — Dans le district de Gourdon, la troupe et la maréchaussée ayant été envoyées pour les abattre, aussitôt le tocsin sonne ; un flot de paysans, quatre à cinq mille hommes, armés de faux et de fusils, arrivent de toutes les paroisses environnantes ; les cent soldats, retirés dans une église, capitulent après un siège de vingt-quatre heures, et sont contraints de nommer les propriétaires qui ont demandé au district leur interven-

  1. Moniteur, séance du 15 décembre 1790 (adresse du département du Lot, 7 décembre). — Séance du 20 décembre (discours de M. de Foucault). — Mercure de France, 18 décembre 1790 lettre de Belves en Périgord, 7 décembre). — Ib., 22 janvier et 29 janvier 1791 (lettre de M. de Clarac, 18 janvier).