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LA RÉVOLUTION


« égal, qu’il ne veut plus de seigneurs et d’évêques, plus de rangs, point de dîmes et droits seigneuriaux. Ainsi ces gens égarés croient user de leur droit et suivre la volonté du roi. » — Les grands mots ont fait leur effet ; on leur a dit que les États Généraux allaient opérer « la régénération du royaume » ; ils en ont conclu « que l’époque de la convocation devait être celle d’un changement entier et absolu dans les conditions et dans les fortunes ». Partant, « l’insurrection contre la noblesse et le clergé est aussi vive que générale ». Dans plusieurs lieux on a fait assez connaître que « c’était ici une espèce de guerre déclarée aux propriétaires et à la propriété » ; et, « dans les villes comme dans les campagnes, le peuple continue de déclarer qu’il ne veut rien payer, ni impôts, ni droits, ni dettes ». — Naturellement, c’est contre le piquet ou impôt sur la farine que porte le premier assaut. À Aix, Marseille, Toulon, et dans plus de quarante villes ou bourgades, il est détruit du coup ; à Aups et à Luc, de la maison de pesage il ne reste que les quatre murs ; à Marseille celle du fermier des boucheries, à Brignoles celle du directeur de la régie des cuirs, sont saccagées : on est décidé « à purger le pays des employés de la régie ». — Ceci n’est qu’un commencement : il faut encore que le pain et les autres denrées soient à bon marché, et tout de suite. À Arles, la corporation des matelots présidée par M. de Barras, consul, venait d’élire ses représentants ; pour clore la séance, ils exigent que, par arrêté, M. de Barras réduise le prix de tous les