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L’ANARCHIE SPONTANÉE


nautés prétendent même ne plus payer d’impôts, jusqu’à ce que leurs députés aux États Généraux aient fixé au juste le chiffre des contributions publiques. — Dans l’Isère, par délibérations imprimées et publiées, elles décident qu’elles ne payeront plus de « droits personnels », et les seigneurs lésés n’osent se pourvoir devant les tribunaux. — À Lyon, le peuple s’est persuadé que « toute perception des droits doit cesser », et, le 29 juin, à la nouvelle de la réunion des trois ordres, « étonné par les illuminations et par les signes de réjouissance publique », il croit que les temps heureux sont venus, il forme le projet de se faire délivrer la viande à 4 sous et le vin au même prix. Les cabaretiers lui insinuent que les octrois vont être abolis, qu’en attendant, le roi, en faveur de la réunion des trois ordres, a accordé trois jours de franchise de tous droits à Paris, qu’on doit également en jouir à Lyon ». Sur quoi la multitude se porte impétueusement aux barrières, à la porte Saint-Clair, à la porte Perrache, au pont de la Guillotière, brûle ou démolit les bureaux, détruit les registres, saccage les logements des commis, enlève l’argent et pille le vin qui attendait en dépôt. Cependant le bruit s’est répandu dans la campagne que l’entrée est libre, et, pendant les jours qui suivent, les paysans affluent avec des files si prodigieuses de voitures de vin à plusieurs bœufs, que, malgré la garde rétablie, force est de les laisser entrer toute la journée sans payer ; c’est seulement le 7 juillet que les droits peuvent de nouveau être perçus. — Il en est de même