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L’ASSEMBLÉE CONSTITUANTE ET SON ŒUVRE


« gieuses, tant choristes que du voile blanc, sans être à charge au public ni à nos familles… Si nous vivions dans le monde, notre dépense y triplerait au moins, » et, non contentes de se suffire, elles font des aumônes. — Parmi ces communautés, plusieurs centaines sont des maisons d’éducation ; un très grand nombre donnent gratuitement l’enseignement primaire. Or, en 1789, il n’y a pas d’autres écoles pour les filles, et, si on les supprime, on bouche à l’un des deux sexes, à la moitié de la population française, toute source de culture et d’instruction. — Quatorze mille hospitalières, réparties en quatre cent vingt maisons, veillent dans les hôpitaux, soignent les malades, servent les infirmes, élèvent les enfants trouvés, recueillent les orphelins, les femmes en couches, les filles repenties. — La Visitation est un asile pour les filles « disgraciées de la nature », et dans ce temps il y en a bien plus de défigurées qu’aujourd’hui, puisque, sur huit morts, la petite vérole en cause une. On y reçoit aussi des veuves, des filles sans fortune et sans protection, des personnes « fatiguées par les agitations du monde », celles qui sont trop faibles pour livrer la bataille de la vie, celles qui s’en retirent invalides ou blessées ; et « la règle, très peu pénible, n’est pas au-dessus des forces de la santé la plus délicate et même la plus débile ». Sur chaque plaie sociale ou morale, une charité ingénieuse applique ainsi, avec ménagement et avec souplesse, le pansement approprié et proportionné. — Enfin, bien loin de se faner, presque toutes ces communautés florissent, et, tandis qu’en