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LA RÉVOLUTION


misérables aperçoivent une issue ; ils s’élancent, d’abord par pelotons, puis en masse, et la révolte maintenant est universelle, comme autrefois la résignation.

II

C’est que, par cette ouverture, l’espérance entre comme une lumière, et descend peu à peu jusque dans les bas-fonds. Depuis un demi-siècle, elle monte, et ses rayons, qui ont d’abord éclairé la haute classe dans ses beaux appartements du premier étage, puis la bourgeoisie dans son entre-sol et son rez-de-chaussée, pénètrent depuis deux ans dans les caves où le peuple travaille, et jusque dans la profonde sentine, dans les recoins obscurs où les gens sans aveu, les vagabonds, les malfaiteurs, toute une tourbe immonde et pullulante se dérobe aux poursuites de la loi. — Aux deux premières assemblées provinciales instituées par Necker en 1778 et 1779, Loménie de Brienne vient, en 1787, d’en ajouter dix-neuf autres ; sous chacune d’elles sont des assemblées d’arrondissement ; sous chaque assemblée d’arrondissement sont des assemblées de paroisse[1], et toute la machine administrative est transformée. Ce sont ces nouvelles assemblées qui répartissent la taille et en surveillent la perception, qui décident et dirigent tous les travaux publics, qui jugent en dernier ressort la

  1. Tocqueville, l’Ancien régime et la Révolution, 272-290. — Léonce de Lavergne, les Assemblées provinciales, 109. — Procès-verbaux des Assemblées provinciales, passim.