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LA RÉVOLUTION


Langres à Gray, en moyenne trois châteaux saccagés sur cinq ; dans le Dauphiné, vingt-sept incendiés ou dévastés ; cinq dans le petit pays du Viennois, et, outre cela, tous les monastères : neuf au moins en Auvergne ; soixante-douze, dit on, dans le Mâconnais et le Beaujolais, sans compter ceux de l’Alsace. Le 31 juillet, Lally-Tollendal, montant à la tribune, avait déjà les mains pleines de lettres désolées, la liste de trente-six châteaux brûlés, démolis, ou pillés dans une seule province, et le détail d’attentats pires encore contre les personnes[1] : « Dans le Languedoc, M. de Barras coupé en morceaux devant sa femme prête d’accoucher et qui en est morte ; en Normandie, ce gentilhomme paralytique abandonné sur un bûcher et qu’on a retiré les mains brûlées ; dans la Franche-Comté, Mme de Bathilly forcée, la hache sur la tête, de donner ses titres et même sa terre ; Mme de Listenay forcée au même abandon, ayant la fourche au col et ses deux filles évanouies à ses pieds… ; le comte de Montjustin et sa femme ayant pendant trois heures le pistolet sur la gorge, tirés de leur voiture pour être jetés dans un

    (séance du 8, discours d’un député du Dauphiné). — Mermet, Histoire de la ville de Vienne, 445. — Archives nationales, ib. (Lettre de la commission des États du Dauphiné, 31 juillet) : « La liste des châteaux incendiés ou dévastés est immense. » La commission en cite déjà seize. — Puthod de Maison-Rouge, ib. : « Pour parler de tous les lieux dévastés, il faudrait citer la province entière. » (Lettre de Mâcon) : « Ils n’en ont pas moins détruit la plupart des châteaux et des maisons bourgeoises, tantôt en les brûlant, tantôt en les démolissant. »

  1. Lally-Tollendal, Seconde Lettre à mes commettants, 104.