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LE DÉFAUT ET LES EFFETS DU SYSTÈME


continue et la confirmation terminale, pendant deux semaines, il régente le conseil local, puis, pendant onze mois et demi, seul administrateur, seul chargé de l’exécution quotidienne et consécutive, il règne dans la société locale. — Sans doute, ayant touché et déboursé de l’argent pour elle, il est comptable et présentera ses comptes, ceux de l’année, dans la session suivante ; à la commune, dit la loi[1], « le conseil municipal entendra et pourra débattre le compte des recettes et dépenses municipales ». — Mais lisez le texte jusqu’au bout, et notez le rôle qu’en cette occasion la loi assigne au conseil. C’est le rôle du chœur dans une tragédie antique : il assiste, écoute, approuve ou blâme, au second plan et en sous-ordre ; approuvés ou blâmés par lui, les personnages principaux de la pièce restent maîtres d’agir à leur guise ; ils s’accordent ou ils contestent par-dessus sa tête, indépendamment, comme il leur plaît. Effectivement, ce n’est pas au conseil municipal que le maire rend ses comptes, c’est « au sous-préfet, qui les arrête définitivement » et lui donne décharge ; quoi que dise le conseil, la décharge est valable ; pour plus de sûreté, si quelque conseiller se montre trop récalcitrant, le préfet « peut suspendre de ses fonctions » la mauvaise tête et rétablir dans le conseil l’unanimité un instant troublée. — Au département, le conseil général « entendra » de même les comptes de l’année ; par une omission significative, la

  1. Loi du 28 pluviôse an VIII.