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OBJET ET MÉRITES DU SYSTÈME


vu les suites inévitables d’un tel régime fiscal, l’excès des extorsions et de la misère, la spoliation, les privations, la fureur sourde des petits et des pauvres. Tout gouvernement est tenu de les ménager, sinon par humanité, du moins par prudence, et celui-ci y est tenu plus qu’un autre, puisqu’il se fonde sur la volonté du grand nombre, sur le vote réitéré de la majorité comptée par têtes.

À cet effet, dans l’impôt direct il fait deux parts : l’une, la contribution foncière, qui n’atteint pas le contribuable sans propriété ; l’autre, la contribution mobilière, qui l’atteint, mais qui est modique : calculée sur le prix du loyer, elle est minime pour une mansarde, un garni, une masure, un taudis quelconque d’ouvrier ou de paysan : encore, s’ils sont indigents ou si l’octroi est lourd, tôt ou tard le fisc les en dispensera. Ajoutez-y la contribution personnelle, qui leur prend depuis 1 fr. 50 jusqu’à 4 fr. 50 par an, et la très petite contribution des portes et fenêtres, 60 centimes par an, dans les villages, pour une chaumière qui n’a qu’une porte et qu’une fenêtre, 60 à 75 centimes par an, à la ville, pour une chambre qui est au-dessus du second étage et n’a qu’une fenêtre[1]. De cette façon, l’ancienne taxe, qui était accablante, devient légère : au lieu de payer 18 ou 20 livres pour sa taille, sa capitation et le reste, le journalier, l’artisan sans propriété, ne paye plus que 6 ou

    une vérité incontestable qu’il y a en France 7 millions d’hommes qui demandent la charité, et 12 millions hors d’état de la leur faire. »

  1. Loi du 3 floréal an X, titre II, article 13, § 3 et 4.