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LES MŒURS ET LES CARACTÈRES


la multitude, son cœur suit toujours sa meute. Vingt fois, en 1790, on lit sur son journal que tel jour le cerf chasse à tel endroit ; il souffre de n’y pas être. Nulle privation plus intolérable ; on retrouve la trace de son chagrin jusque dans la protestation qu’il rédigera avant de partir pour Varennes : transporté dans Paris, sédentaire aux Tuileries, « où, loin de trouver les commodités auxquelles il était accoutumé, il n’a pas même rencontré les agréments que se procurent les personnes aisées », il lui semblera que sa couronne a perdu son plus beau fleuron.

VI

Tel général, tel état-major ; les grands imitent le monarque. Comme une colossale effigie de marbre précieux érigée au centre de la France, et dont les copies réduites se répandent par milliers d’exemplaires dans toutes les provinces, ainsi la vie royale se répète, en proportions moindres, jusque dans la gentilhommière la plus reculée. On représente et on reçoit ; on fait figure et on passe son temps en compagnie. Je vois d’abord, autour de la cour, une douzaine de cours princières ; chaque prince ou princesse du sang a, comme le roi, sa maison montée, payée en tout ou en partie sur le Trésor, distribuée en services distincts, avec gentilshommes, pages, dames pour accompagner, bref cinquante, cent, deux cents et jusqu’à cinq cents charges.


  anc. rég. i.
T. I. — 12