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L’ANCIEN RÉGIME


verts, l’hôtel des voitures de la cour, magasin des bâtiments et menus-plaisirs, ateliers et magasins pour les menus-plaisirs, grande écurie, petite écurie, autres écuries dans la rue de Limoges, dans la rue Royale et dans l’avenue de Saint-Cloud, potager du roi comprenant vingt-neuf jardins et quatre terrasses, grand-commun habité par deux mille personnes, maisons et hôtels dits des Louis où le roi assigne des logements à temps ou à vie : avec des mots sur du papier, on ne rend point l’impression physique de l’énormité physique. — Aujourd’hui, de cet ancien Versailles mutilé et approprié à d’autres usages, il ne reste plus que des morceaux ; allez le voir pourtant. Considérez ces trois avenues qui se réunissent sur la grande place, larges de quarante toises, longues de quatre cents, et qui n’étaient point trop vastes pour la multitude, le déploiement, la vitesse vertigineuse des escortes lancées à fond de train et des carrosses courant « à tombeau ouvert[1] » ; voyez, en face du château, les deux écuries, avec leurs grilles de trente-deux toises, ayant coûté, en 1682, trois millions, c’est-à-dire quinze millions d’aujourd’hui, si amples et si belles que, sous Louis XIV lui-même, on en faisait tantôt un champ de cavalcades pour les princes, tantôt une salle de théâtre, et tantôt une salle de bal ; suivez alors du regard le développement de la gigantesque place demi-circulaire, qui, de grille en grille et de cour en cour, va montant

  1. Il y avait alors, presque chaque jour, des passants roués à Paris par les voitures à la mode, et c’était l’habitude chez les grands d’aller très vite.