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LA STRUCTURE DE LA SOCIÉTÉ


sence aux États », et qui, avec leur capitaine, coûtent par an 15 000 livres. Elle paye de même au gouverneur de quatre-vingts à cent gardes « qui reçoivent chacun 300 ou 400 livres, outre beaucoup d’exemptions, et ne sont jamais en fonctions puisque le gouverneur ne réside jamais » ; pour ces fainéants subalternes la dépense est de 24 000 livres, outre 5 000 à 6 000 pour leur capitaine, à quoi il faut ajouter 7 500 pour les secrétaires du gouverneur, outre 60 000 livres d’appointements et des profits infinis pour le gouverneur lui-même. Je vois partout des oisifs secondaires pulluler à l’ombre des oisifs en chef et puiser leur sève dans la bourse publique qui est la commune nourrice. Tout ce monde parade, boit et mange copieusement, en cérémonie : tel est leur principal emploi, et ils s’en acquittent en conscience. Les tenues d’États sont des bombances de six semaines, où l’intendant dépense 25 000 livres en dîners et réceptions[1].

Aussi lucratives et aussi inutiles sont les charges de cour[2], sinécures domestiques dont les profits et accessoires dépassent de beaucoup les émoluments. Je trouve dans l’état imprimé 295 officiers de bouche sans compter les garçons pour la table du roi et de ses gens, et « le

  1. Archives nationales, H, 944, 25 avril et 20 septembre 1780, Lettres et Mémoires de M. Furgole, avocat à Toulouse.
  2. Archives nationales, O1, 738 (Rapports faits au bureau général des dépenses de la maison du roi en mars 1780, par M. Mesnard de Chouzy). — Augeard, Mémoires, 97. — Mme Campan, Mémoires, I, 291. — Marquis d’Argenson, Mémoires, 10 février, 9 décembre 1751. — Essai sur les capitaineries royales et autres (1789), 80. — Waroquier, État de la France en 1789, I, 266.