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En face, le chœur tout noir ; seule, une fenêtre lumineuse se détache au fond de l’abside, pleine de figures rayonnantes, comme une percée sur le paradis. Le chœur est rempli de prêtres pourtant ; mais on n’en distingue rien, tant les ténèbres sont épaisses et la distance grande. Point d’ornements visibles, ni de petites idoles ; deux chandeliers seulement étincellent avec leurs flambeaux allumés, comme des âmes tremblantes, aux deux coins de l’autel, dans l’obscurité, parmi les grandes formes qu’on devine. Des chants montent et redescendent à intervalles égaux, comme des encensoirs qui se balancent ; parfois les voix claires et lointaines des enfants de chœur font penser à une mélodie de petits anges ; de temps en temps une ample modulation d’orgue couvre tous ces bruits de sa majestueuse harmonie.

Je suis allé jusqu’à l’entrée du chœur, et de là, la rosace orientale, plus sévère et plus noble que partout ailleurs, a éclaté dans sa bordure noire et bleue au-dessus de l’énorme obscurité des premiers arceaux. Les piliers allongeaient leurs files, colossaux, immuables ; la profondeur