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sous le soleil un treillis doré, et sous ces topazes mouvantes, le sable uni, les algues verdâtres ont une grâce infinie.

Impossible d’exprimer la beauté de cet azur illimité, qui s’étale de tous côtés à perte de vue ; quel contraste avec le dangereux et lugubre Océan ! Cette mer est une belle fille heureuse, dans sa robe de soie lustrée toute neuve. Du bleu et encore du bleu rayonnant, jusqu’au bout, jusqu’au fond ; l’horizon manque. — Par contraste, la longue bande de roche du Lazaret, le château d’If, sont d’une blancheur délicieuse — blanc et bleu, c’est la couleur des vierges. Comment faire comprendre une couleur ? Comment, avec des mots, montrer que ce blanc, ce bleu sont divins par eux-mêmes ? Rien autre chose dans tout le paysage. La nature se réduit à cela, une coupe de marbre blanc et de l’azur dedans. — Aux deux bouts, à droite et à gauche, les hauts rochers, labourés, rayés, ravinés, lointains, emprisonnent l’air dans leurs crevasses, dans leurs enfoncements et semblent dormir sous un voile.

Nous nous sommes baignés ; la mer porte le