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presque tout un corps de cavalerie campé sur leur territoire. A ce début, la province se soulève, et, pour ceux qui voulaient la guerre, c’était un exemple à suivre, ou un moyen de sonder le caractère du nouveau gouverneur. Alors Agricola, quoique l’été fût passé, les troupes éparses dans la province, le soldat s’attendant au repos pour cette année, la guerre contrariée par des retards et des obstacles, et quoiqu’à la plupart il semblât préférable de garder les lieux exposés, résolut d’aller au devant du danger. Il rassemble des détachements de légions et une petite troupe d’auxiliaires ; et, comme les Ordoviques n’osaient pas descendre en plaine, marchant lui-même en tête de l’armée, pour lui donner son courage en partageant ses périls, il la fait monter en bataille, taille en pièces presque toute cette peuplade ; et, n’ignorant pas qu’il faut presser la renommée, et que des premiers événements dépendent tous les autres, il conçoit le projet de réduire l’île de Mona, dont Paullinus avait été rappelé par la rébellion de toute la Bretagne, ainsi que je l’ai rapporté plus haut. Mais, en ce dessein imprévu, les vaisseaux manquaient ; le génie et la constance du général n’en furent point arrêtés. Il choisit parmi nos auxiliaires ceux qui connaissaient les gués, et, suivant l’usage de leur pays, savaient nager en conduisant à la fois eux, leurs armes et leurs chevaux, ordonne qu’ils déposent les bagages, et les fait passer si soudainement, que les ennemis, qui attendaient une flotte, des vaisseaux et les effets du flux, sont stupéfaits et comprennent qu’il n’y a rien d’inaccessible, rien d’invincible pour ceux qui allaient de la sorte au combat. La paix fut donc sollicitée, l’île soumise, et la renommée du chef en acquit un grand éclat.