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Il y a quatre ans, le malade eut des troubles de la vue, dus principalement à un mauvais fonctionnement des muscles des yeux. Pendant une certaine période, il fut atteint de double vision. Apparemment, la guérison de ces troubles fut complète. Il y a deux ans, il eut une attaque accompagnée d’une infirmité du côté gauche de la face et d’un affaiblissement du côté droit du corps. À la suite de ce dernier incident, des difficultés locomotrices, une faiblesse générale et un affaiblissement des fonctions mentales devinrent de plus en plus apparents. À partir du milieu de 1944, le malade dépendait de plus en plus de sa femme ; elle était la seule personne qui paraissait comprendre pleinement ses paroles et ses besoins.

Le 25 novembre 1944, il allait du jardin à la maison, et soudain parut courir (locomotion automatique). Juste avant d’atteindre la maison, il tomba et se blessa au bras. À la suite de cet accident, il fut soigné à l’hôpital local, s’y rendant en voiture. Le 4 décembre, tandis qu’il se rendait à l’hôpital de Schwarzach-St-Veith et qu’il dormait dans le fond de la voiture, le chauffeur fut obligé de se ranger pour éviter un autre véhicule et de freiner brusquement. Krupp von Bohlen fut projeté en avant et il se heurta le front et l’arête du nez à une barre en métal qui se trouvait derrière le siège du chauffeur. Il ne perdit pas connaissance, mais son état était tel qu’il fut gardé à l’hôpital pendant huit semaines environ. Pendant son séjour à l’hôpital, il reconnut sa femme, sa famille et son personnel ; il leur parla, quoique avec hésitation.

Depuis l’accident mentionné ci-dessus, l’état général du malade s’aggrava rapidement. Il devenait de plus en plus difficile pour le personnel de le comprendre. D’abord, avec l’aide de deux personnes, il put faire quelques pas ; jusqu’à il y a deux mois, il a passé de courts moments assis sur une chaise. L’aide des domestiques était nécessaire pour ce travail. Il est affligé d’incontinence d’urine et de fèces depuis son retour de l’hôpital, en février 1945. Depuis cette date, il n’a prononcé que de rares paroles sans suite ; ces paroles étaient simples et sans aucune association rationnelle, à l’exception de jurons, comme « Ach Gott ! » et « Donner Wetter » quand on le dérangeait. Il était parfois excessivement irritable et il eut d’inexplicables crises de larmes. Pendant ces deux derniers mois, il est devenu de plus en plus apathique, et il ne reconnaissait plus sa famille et ses amis. Mme  von Bohlen pense qu’il peut encore la reconnaître en tant que visage familier, mais il n’exprime aucune preuve de réaction émotionnelle en sa présence. Elle pense qu’il réalise parfois que des étrangers sont dans la pièce ; par exemple des représentants des armées alliées et ses réactions sont très tendues.