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de la Religion.

en proie aux inquietudes de leur propre naturel, le mal ne ſera pas grand ; & il ne ſera pas fort dificile de gagner les autres, & de les reconcilier.

A préſent, les corruptions exceſſives, qui ſont répandues dans l’adminiſtration de nos affaires, paſſent l’Imagination. Des perſonnes d’une grande habileté ont fait voir par un calcul exact, que de ſix millions, qu’on leve tous les Ans ſur le Peuple, pour le bien public, un bon tiers s’abime dans les differentes Claſſes & Subordinations de ceux qui adminiſtrent nos Deniers avant que le reſte puiſſe être emploïé pour l’utilité de la Patrie. C’eſt-là un inconvenient accidentel de notre Liberté : &, tandis qu’on confiera nos affaires à des gens, qui ne ſont ſuſceptibles d’aucun remords, & qui n’ont d’autre vuë qu’un vil intérêt, la ſeule choſe, qui pouroit nous défendre, contre leurs rapines, ce ſeroit le pouvoir arbitraire d’un Prince, qui les feroit pendre, dès que leurs Fraudes ſeroient découvertes. Mais, chez nous, le Souverain ne peut rien ſans les Loix ; & le ſeul danger, où ces Scelerats s’expoſent, en cas qu’on découvre leurs vols, c’eſt la perte de leurs