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Bataille

t’ont donné qu’une paire d’ailes, & un impertinent baſſon dont le bourdonnement te fait donner au Diable. Tu ne trouves ta ſubſtance, que dans un brigandage univerſel ; tu n’ès que la flibuſtiere des Campagnes & des Jardins ; & tu as tant de panchant pour le larçin, que tu dérobes les orties comme les violettes, ſimplement pour le plaiſir de dérober. Pour moi, je ſuis une heritiere conſiderable, enrichie par la nature même ; &, c’eſt de mon propre corps, que je tire tout ce qui m’eſt néceſſaire, pour ma ſubſiſtance. Mon habileté égale mes thréſors, & pour te faire voir quel progrès j’ai fait dans les Mathematiques[1], examine bien ce Chateau. Non ſeulement tous les materiaux en ſont emanez de ma ſubſtance même ; mais, mes propres mains l’ont bâti : j’en ſuis l’Architecte moi-même.

Je ſuis bien aiſe, repartit l’Abeille d’une maniere gaie & tranquille, que vous daigniez avoüer, que j’ai acquis mes ailes, & ma muſique, par des voies legitimes ; & que je n’en ſuis redevable, qu’à

  1. C’eſt le grand Fort des Modernes. C’eſt au Public à juger ſi l’Auteur a raiſon de les turlupiner la-deſſus.