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DU TONNEAU.

Je n’ai garde de lui donner un démentir là-deſſus ; mais, je crains bien, qu’à force de ſe ſervir de cet expédient, il n’ait rendu à la fin les Lecteurs plus habiles, qu’il ne le ſouhaitoit. Ils ont été ſi ſouvent les Dupes de ces grands préparatifs, qu’il eſt douloureux de voir à preſent, avec quel air dédaigneux on ſaute, comme ſi c’étoit autant de Latin, les cinquante ou ſoixante pages, qui font à peu près l’étenduë moderne à d’une Préface, ou d’une Epitre Dedicatoire.

On ne ſauroit nier pourtant, d’un autre côté, qu’un nombre conſiderable de perſonnes ne deviennent Critiques & Beaux-Eſprits, par cette ſeule Lecture. La choſe eſt inconteſtable ; & l’on peut avec beaucoup de juſteſſe partager tous les Lecteurs d’à-préſent dans ces deux Claſſes. Les uns ne liſent que les Diſcours préliminaites, & les autres n’en liſent jamais. Pour moi, je fais profeſſion d’être de la derniere ; &, pour cette raiſon, me ſentant la démangeaiſon moderne de m’étendre ſur le mérite de mes propres productions, & d’en déveloper les parties les plus brillantes, j’ai jugé à propos de le faire dans le corps