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HISTOIRE DES CANADIENS-FRANÇAIS

général des Algonquins, et que d’ordinaire l’on désignait un certain nombre de ceux-ci sous le nom de gens ou Sauvages de l’Île, pour signifier que leur demeure était en cet endroit.

Au XVe siècle, les Iroquois possédaient les Trois-Rivières et Montréal. Le lieu de leur rendez-vous le plus ordinaire paraît avoir été le lac Saint-Pierre. Ce territoire assez restreint leur suffisait, parce qu’ils menaient une vie sédentaire.

Avant d’occuper les rives du Saint-Laurent, les Iroquois avaient vécu dans l’Ouest, selon ce que rapportaient leurs vieillards. Cela donnerait à supposer que les Algonquins, suivant la même marche, de l’ouest à l’est, vinrent après eux et s’arrêtèrent juste aux confins ouest des territoires iroquois, sur l’Ottawa.

Les Iroquois étaient les premiers orateurs sauvages ; ils déployaient parfois assez d’esprit et de science d’argumentation pour déconcerter les Européens instruits. On les nomma Iroquois parce qu’ils terminaient leurs harangues par le mot hiro : j’ai dit. Parmi les nations sauvages, on les nommait Toudamans.

Entre les deux races existaient des différences marquées, quant au caractère, au tempérament, aux mœurs et coutumes, ce qui peut fortifier l’opinion déjà émise de l’arrivée des Algonquins, dans cette partie du monde, à une autre époque que celle où les Iroquois y sont venus.

Nous avons déjà dit que leur langage était différent l’un de l’autre, autant, par exemple, que le grec et le latin.

Connaissant l’humeur et les mœurs pacifiques des Iroquois dans l’origine, et la jactance et les dispositions querelleuses des Algonquins, nous pourrions conjecturer que ces derniers ont dû se rendre en Canada, après avoir traversé le continent de l’ouest à l’est les armes à la main, tandis que les Iroquois y avaient été attirés, avant eux, par le besoin de se soustraire au voisinage de quelque peuple de l’ouest incommode ou conquérant.

Si toutes les nations sauvages du Canada sont venues du côté du soleil couchant, nous croyons que notre hypothèse est assez juste ; si, au contraire, les races algiques proviennent directement de l’Europe, par la voie de l’Atlantique, elle tombe d’elle-même. Ces deux opinions sont aujourd’hui en présence ; il paraît bien difficile de dire de quel côté penchera l’histoire.

Les tribus iroquoises, peu belliqueuses d’abord, mais qui devaient finir par porter la terreur et la dévastation sur presque tous les points de l’Amérique du Nord, cultivaient la terre et dédaignaient la chasse. Elles vivaient réunies en villages ou bourgades. On comprend qu’il résultait de ces dispositions naturelles des individus une forme de gouvernement plus stable, mieux ordonné, exerçant plus d’empire que chez les races moins sédentaires ; aussi l’autorité des chefs et des Conseils était-elle grande parmi les Iroquois. Ce germe se développa à la faveur des événements dont nous allons dire un mot, et devint le nerf du redoutable pacte fédéral des cinq nations iroquoises. Quant au caractère de la plupart de ces tribus, il est célèbre par ses fourberies. Les Iroquois en général étaient doués d’une imagination vive et d’un tempérament passionné.