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CHAPITRE VI

1608 — 13


Acadie. — Poutrincourt. — Port-Royal. — Messire Jessé Flèché. — Souriquois baptisés. — Premiers censitaires. — Compagnie Robin-Biencourt. — Les Pères Jésuites. — Madame de Guercheville. — Port-Royal en 1611. — Défrichements et cultures. — La traite. — Louis Hébert. — Saint-Sauveur. — Argall. — La Saussaye. — Destruction de la colonie acadienne.



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outrincourt jouissait encore de certains priviléges en Acadie, car, dès l’automne de 1607, de Monts avait donné à son fils, Jean de Biencourt, âgé de seize ans, la seigneurie de Port-Royal. Dans le présent chapitre, ces deux hommes joueront le principal rôle.

Les Biencourt, écrit M. Rameau, sortaient d’une bonne et vieille famille féodale de Picardie, dont plusieurs membres avaient figuré dans les croisades.

Jean de Biencourt, baron de Poutrincourt, né en 1557, était baron de Saint-Just, en Champagne, chevalier des ordres du roi, gentilhomme de sa chambre, maître-de-camp de six compagnies d’hommes à pied, et grand ami de Henri iv, dont il avait embrassé le parti vers 1590. « Bien qu’il fût bon catholique, il était personnellement dévoué à la cause monarchique et au roi lui-même ; il le suivit dans toutes ses guerres, et se distingua dans maintes affaires par sa bravoure, et le Béarnais prisait tout particulièrement son dévouement et sa sagacité. » (Rameau.)

La date de son mariage avec Jeanne de Salazar n’est pas connue, mais elle ne doit point être postérieure à 1590. C’est d’elle que venait la baronnie de Saint-Just. Les trois garçons que nous leur connaissons se nommaient : Jean de Biencourt[1], né en 1591 ; Charles de Saint-Just, et Jacques de Salazar.

Poutrincourt était de haute taille, homme de guerre, la main prompte et le cœur généreux. Il tirait l’épée pour le roi, ou s’embarquait pour fonder une colonie avec le même entrain et le même courage. Il avait résolu de se créer en Amérique une position indépendante et d’y faire conduire sa famille, espérant y trouver plus de tranquillité qu’en Europe. Son fils aîné, Jean de Biencourt, « jeune seigneur de grande vertu et fort recommandable, »

  1. Son père et lui signaient « Jean de Biencourt. » Il était donc l’aîné des garçons de Poutrincourt.