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mation que ces deux substances individuelles, il ne peut donc rien s’y trouver qui n’en sorte. Les corps, dans cette hypothèse, sont substantiellement des masses pesantes distinctes, le poids mesure exactement la quantité de matière, et puisqu’il est le même après la combinaison qu’il était avant, c’est que rien ne s’est introduit dans l’unité nouvelle sinon les unités primitives ; elle est bien réellement un composé. Si, au contraire, les deux unités, soufre et fer, sont seulement phénoménales, le sulfure de fer nest pas nécessairement leur somme, il peut nétre qu’une manifestation nouvelle sollicitée par elle dans la substance unique. Comparons les deux hypothèses.

La dernière a d’abord pour elle de ne pas outrepasser arbitrairement les données expérimentales ; nous ne percevons que les phénomènes, et il est clair que rien n’autorise à conclure du groupement des sensations à la division de la substance active qui les cause, pas plus que nous n’avons le droit de supposer trois individus dans un homme dont se manifestent à nous la pensée, la sensibilité et la volonté. Elle a pour elle encore de répondre mieux à l’idée que nous nous faisons de l’homogénéité des composés ; nous concevons le sulfure de fer avec toutes ses propriétés spécifiques sous un poids quelconque, aussi réduit qu’un poids quelconque de fer ou de soufre. Dans la théorie atomique, la molécule de sulfure de fer, c’est-à-dire la partie ultime qu’on ne pourrait diviser sans détruire ce corps, pèse nécessairement plus et est plus étendue que la molécule ou partie ultime du fer ou du soufre, résultat singulier ; mais une répugnance à croire n’est pas une objection, nous n’insistons pas sur ce point. Cette théorie impose une conséquence plus difficile à admettre. Les propriétés du composé ne sont, d’après elle, que des résultantes et ne sau-