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L’univers porte en soi d’infaillibles conseils
Dont la sagesse a l’air d’une atroce démence :
Sans âge, il fut longtemps une fournaise immense
Qui crachait son écume en tournoyants soleils.

Ces soleils ont lancé d’autres éclats pareils,
Dont la ronde à son tour se brise et recommence ;
Puis la vie a des cieux affronté l’inclémence
Et cherché des climats pour ses frêles éveils ;

L’antique masse en feu, qui n’était qu’incendie,
En se disséminant d’astre en astre attiédie,
A perdu sa fureur dans les mondes nouveaux ;

Mais c’est sur leur écorce éteinte que la flamme
Se transforme, vouée à de sombres travaux,
En force pour la lutte et pour l’angoisse en âme.




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