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les destins

Tous ceux qu’auront fauchés la peste et les batailles
Du dernier germe au fond des dernières entrailles ! »

La vie à fleur du sol en même temps perçait,
Et ce monde maudit, la Terre, commençait.
La Terre depuis lors accomplit les années,
Marchant à pas constants sous des signes divers,
Renouvelant le cours sans fin des destinées
Selon les jours, les nuits, les printemps, les hivers.
Elle emporte avec l’homme et l’amour et la haine,
Ensemble ou tour à tour et la joie et la peine,
La lyre et les marteaux, et l’or et les sueurs,
Et la paix et la guerre, et le rire et les pleurs ;
Combinaison profonde et d’espoir et de crainte,
Et de libre vouloir et de force restreinte,
De loisir, de travail, de gloire, de péril,
De méritoire effort, d’instinct méchant ou vil,
De vertu, de malheur, d’honneur et de martyre !
C’est le mieux combattu sans cesse par le pire.